Doctorant au LGéCo, Timothée Grunder tente de trouver le nanomatériau le plus performant afin de substituer les diamants d’usinage en industrie. Une recherche appliquée qui sied bien à cet ingénieur en mécanique formé par l’alternance, sportif et amoureux de la nature.
Enfant, Timothée se rêvait inventeur, un peu comme Tesla, le pionnier du courant alternatif et rival d’Edison. « Ce que je trouve fabuleux chez Tesla, c’est qu’il était à la fois très à l’aise dans la théorie et qu’il fabriquait lui-même ses machines de A à Z. J’admire ceux qui arrivent à joindre les deux. Il est inspirant ». C’est vrai que ce profil correspond assez bien à la personnalité du jeune doctorant. En témoigne sa thèse, portant sur un sujet innovant et une problématique industrielle concrète.
Son but est de trouver la nanocéramique qui pourra substituer les coûteux diamants de synthèse utilisés dans l’industrie pour la découpe des panneaux composites. Nanocéramique, car le procédé de fabrication permet d’obtenir des grains si fins (de l’ordre de quelques centaines de nanomètres) qu’elle offre de nouvelles propriétés physiques, chimiques et mécaniques. Ces céramiques nanostructurées sont à base d’aluminium et de zirconium. Timothée étudie leurs propriétés pour déterminer celle qui sera la plus performante pour cette application.
« On a la sensation d’être parmi les pionniers, c’est excitant »
Pendant les trois ans de sa thèse, de 2012 à 2015, il est embauché en CDI chez Diamonde, une PME alsacienne qui produit les outils de découpe pour les fabricants de parquets ou de meubles. Sa thèse est financée par une bourse CIFRE (conventions industrielles de formation par la recherche) de l’ANRT (Association nationale recherche technologie) sous la forme d’une subvention versée à l’entreprise.
Les travaux de thèse ont permis à l’équipe de recherche de déposer leur troisième brevet. Ils ont d’abord étudié dix nuances de la famille des oxydes, puis ciblé une composition spécifique, actuellement en développement et objet d’études approfondies. « L’intérêt, mais aussi la difficulté, est que c’est un domaine tout nouveau, il existe encore très peu de théorie, de travaux publiés. C’est pourquoi nous nous basons surtout sur des essais. Nous cherchons à défricher, à poser les bases. C’est aussi ce qui est génial : explorer quelque chose de nouveau. La dimension innovation est très forte. On a la sensation d’être parmi les pionniers. Et comme l’entreprise me fait confiance, c’est excitant de diriger les recherches, de pouvoir prendre des initiatives et des décisions, je suis assez libre sur le plan scientifique. »
Il travaille notamment avec IKTS, un institut du réseau allemand Fraunhofer, l’un des plus importants organismes de recherche au monde, dédié aux sciences appliquées. Il est actuellement en phase de réflexion, synthèse et rédaction pour rendre son « manuscrit » en juin et terminer deux articles qu’il espère voir publier dans la littérature scientifique.
« J’aime me laisser surprendre »
Amoureux de la nature, inspiré par le biomimétisme, Timothée pratique la pêche à la mouche, la plongée sous-marine, mais aussi la nage, la boxe, le judo… Dans son parcours, il a toujours recherché le côté pragmatique pour se former. D’abord au lycée, il choisit la filière STI plutôt qu’un bac général, puis un BTS mécanique et automatismes industriels en alternance, plutôt qu’une classe prépa où il était pourtant accepté. « J’avais besoin d’un côté applicatif pour comprendre ce que je faisais et m’éclater» dit-il. Accepté à l’INSA de Strasbourg, il choisit aussi l’alternance qui lui permet d’avoir un pied dans l’entreprise. Il était embauché chez Tschoeppe durant son BTS, puis chez Lohr Industrie en FIP méca. Il ne se projetait pas dans la recherche, mais il a été séduit par le projet de Diamonde, dont lui a parlé Murielle Bach, qui a encadré son PFE. « J’aime me laisser surprendre » sourit-il. Recherche ou industrie, ses projets d’avenir restent ouverts aux opportunités.
« Etude de l’application de céramiques sub-µm Al2O3 et 3Y-ZrO2 à l’usinage grande vitesse de matériaux composites », thèse dirigée par Pierre Mille et encadrée par Murielle Bach.
Stéphanie Robert